
Résumé :
Les premiers papillons ont éclos derrière ses paupières. Elle en avait déjà vu de semblables, enfant, un été au bord de l’océan, jaunes et violets contre le ciel d’azur.
Elle était allongée au soleil, l’herbe souple courbée sous sa peau dorée. Le vent tiède soufflait le sel iodé de la mer dans ses cheveux. Aujourd’hui, l’astre était noir. Le sol dur sous ses épaules. Et l’odeur était celle d’une marée putride qui se retire. Les papillons s’éloignaient de plus en plus haut, de plus en plus loin. Et l’air lui manquait. Lui manquait… Elle a ouvert la bouche pour respirer un grand coup, comme un noyé qui revient d’un seul coup à la surface. Les papillons ont disparu, brusquement effrayés par un rugissement issu du fond des âges…
Mon avis :
Jacques Saussey est un auteur que je n’avais jamais lu. Quand son roman Enfermé.e est sorti, certains de ses lecteurs ont publié des avis plutôt négatifs. Il semblait que ce roman ne soit pas à l’image de tous ceux qu’il avait publiés avant. C’est donc par celui-ci que j’ai décidé de commencer pour découvrir cet auteur. Et ce fût pour moi une très belle découverte.
Enfermé.e c’est l’histoire de Virginie, « mi-homme mi-femme, plus tout à fait l’un et pas encore complètement l’autre, coincé(e) entre deux univers qui sont normalement bien distincts et bien identifiables« , une histoire violente émotionnellement mais tellement émouvante.
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Aujourd’hui infirmière dans un centre pour personnes âgées après avoir passé de longues années en prison, Virginie a eu une vie des plus difficiles. De son enfance à maintenant, en alternant les deux époques, l’auteur nous déroule le fil de sa vie et mon dieu quelle émotion!!! Tout ce qu’elle a dû subir est vraiment terrible. Certaines scènes sont parfois à la limite du supportable.
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J’ai énormément aimé cette lecture, violente, sombre, sur un sujet difficile. J’ai aimé découvrir la personnalité de Virginie, son évolution de son enfance à aujourd’hui, j’ai souffert avec elle. Le sujet de la transidentité est original et l’auteur en parle très bien. On arrive parfaitement à ressentir la douleur de ces personnes dont le corps physique ne ressemble pas à ce qu’elle sont profondément.
« Si je ne peux pas être qui je suis, je préfère être morte plutôt qu’être emprisonnée dans un corps qui n’est pas le mien. »
J’ai aussi aimé la réflexion sous jacente sur le sort des personnes âgées qui finissent leur vie dans des établissements spécialisés, parfois abandonnées par leur famille et dont les seules interactions sociales sont celles qui se font avec le personnel. La relation qui se noue entre Virginie et Marie en est une illustration parfaite.
Et si au final l’intrigue cachée derrière cette histoire se révèle un peu trop tardivement à mon goût, elle pimente la fin de cette lecture qui m’a emportée, qui m’a touchée et dont je retiendrai plus le côté psychologique et émotionnel que l’intrigue.
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Bref, j’ai aimé cette lecture et je récidiverai avec cet auteur.